Vivre, travailler et s’amuser à la montagne.

6 min de lecture

17  J'aime

Par Joel Evans

Depuis que j’ai déménagé à Chamonix en 2011, je cherche à passer le plus de temps possible en montagne et au bout de 9 ans, j’ai enfin réussi.

J’écris ceci après avoir terminé un entraînement de 1 000 m de dénivelé sur un escalier. Je dois faire preuve d’imagination vu que nous sommes confinés en France à cause de la pandémie de COVID-19. Quand j’ai appris que nous n’avions pas le droit d’aller à plus d’un kilomètre de chez nous et comme je ne savais pas à quel moment tout ceci prendrait fin, je me suis vite dit que j’allais devoir trouver un moyen de garder mes jambes fortes et actives. Avec 2,67 mètres de dénivelé obtenus sur 16 marches, il suffisait de trouver un bon podcast à écouter et 375 fois plus tard, je l’avais atteint, mon kilomètre vertical !

Bref, assez parlé du virus, je suis sûr que vous en avez tous déjà trop entendu parler et que vous avez plutôt envie de vous changer les idées. J’aimerais partager avec vous mon parcours qui m’a fait passer de skieur occasionnel à homme de la montagne à plein temps !

Joel Evans alpiniste ski chamonix

J’ai déménagé à Chamonix en 2011 en tant que snowboardeur avide de découvertes et avec l’envie de descendre le plus de pistes possible. Mon frère était chauffeur-guide et son emploi du temps semblait être la solution idéale pour pouvoir passer plein de temps à explorer les sommets. J’aimais l’idée de faire ce travail après avoir bossé dans un bar quand j’étais étudiant. Je savais que les horaires tardifs ne seraient pas compatibles avec le fait de vouloir surfer sur les premières neiges du matin. Après avoir envoyé des mails à toutes les boîtes de chauffeurs dans la station, j’ai fini par décrocher un poste en décembre. J’ai trouvé un logement grâce à un groupe Chamonix sur Facebook, fait mes valises et je suis parti pour ma première saison d’hiver ! Mon emploi en tant que chauffeur pour les transferts vers l’aéroport me permettait de surfer au moins 3 jours par semaine. C’était déjà super, ne vous méprenez pas, mais les années passant j’ai développé une vraie passion pour la montagne et ai vite cherché à me dégager le plus de temps possible pour m’y adonner. Je prenais les horaires du soir au bureau, ce qui me permettait de faire un 1 000 m avec mon chien avant d’aller bosser, ou de dévaler quelques pistes avant d’aller m’affaler dans ma chaise pendant 8 heures en luttant pour ne pas sombrer dans le sommeil après une matinée aussi intense.

Pendant que grandissait mon amour pour la montagne, émergeait aussi mon ambition. Attiré par l’alpinisme « rapide et léger » et par le ski alpin, je me suis mis à passer des journées entières dans la montagne à m’attaquer à des grands sommets directement depuis le parking. J’allais au sommet et je revenais. C’est après l’été 2017 et mon ascension du Mont-Blanc, du Cervin et du Grand Paradis, tous effectués d’une traite, que je me suis fait la réflexion en rentrant chez moi que je devais trouver une profession au contact de la nature. L’idée que ces montagnes deviennent mon nouveau bureau a alors émergé.

Joel Evans alpiniste ski chamonix
Joel Evans ski saut freeski chamonix

N’étant pas un grimpeur et n’ayant pas envie que mon amour pour le ski devienne mon métier, je me suis tourné vers l’Union des associations internationales de chefs de montagne (UIMLA). Ce diplôme autorise le titulaire à être guide sur les zones vallonnées sans glacier et ne nécessitant pas l’utilisation de cordes. C’était juste parfait. Cela signifiait passer mes journées en montagne sans le stress lié aux sommets de haute altitude.

Après avoir regardé en détails en quoi consistait le diplôme, je me suis rendu compte que j’avais déjà validé tous les pré-requis, alors je me suis inscrit à mon premier cours de formation en Écosse. La formation et le diplôme se déroulent sur deux semaines d’apprentissage puis deux semaines d’évaluation réparties sur un minimum de 18 mois, avec un complément d’apprentissage et de pratique entre les deux.  Mon premier cours de formation a eu lieu en Écosse en novembre 2017 et j’ai eu mon diplôme UIMLA en tant que guide en janvier 2019.

Peu après avoir fini la formation, j’ai commencé à travailler. C’était encore l’hiver alors mes options étaient limitées à devenir guide raquette. Pour être tout à fait honnête avec vous, ce n’est pas ce qui m’amuse le plus ; je préfère être sur des skis. Cela étant dit, avoir la possibilité d’être dehors et de jouer dans la neige avec des personnes sympas a vite pris plus d’intérêt à mes yeux que d’être assis derrière un bureau !

Joel Evans alpiniste ski chamonix

L’hiver 18/19 est passé très vite, et j’ai enfin pu atteindre mon « objectif » de grimper 100 000 m en ski à la mi-avril. Je travaille rarement en mai depuis que je vis à Chamonix, ce qui m’a laissé l’occasion de profiter de mon mois préféré de l’année. Le printemps dans les Alpes est vraiment très spécial. Avoir la possibilité de skier sur de la poudreuse à 4 000 m d’altitude puis d’aller à un barbecue le soir en station, c’est vraiment un régal.

Lorsque le printemps est arrivé, je me suis rendu compte que mon été allait être très chargé entre les randos et les sorties running. Il était temps de mettre les skis de côté et de me concentrer sur ce que je venais d’apprendre au cours de ma formation. Cela étant dit, j’ai quand même vécu pas mal de choses incroyables cet hiver-là grâce à mes skis : grimper à plus de 110 000 m, descendre des pistes incontournables du Mont-Blanc ou skier sur la Haute Route (Chamonix-Zermatt en deux jours).

Pendant mon premier été en tant que guide, j’ai accompagné plus de 150 clients et j’ai fait des randos et des courses à travers 3 pays : la France, l’Italie et la Suisse. J’ai bouclé le célèbre Tour du Mont-Blanc une demi-douzaine de fois et j’ai fait, en marchant et en courant, les 185 kilomètres et 12 000 m de dénivelé de la Haute Route deux fois.  En finissant fin septembre, après avoir parcouru plus de 2 000 kilomètres et atteint 50 000 m de dénivelé, j’étais prêt à ralentir la cadence et profiter de l’automne.

L’automne est assez tranquille quand on habite à Chamonix. Les touristes s’en vont, le travail se fait rare et les montagnes comme les pistes de trail sont vides. Tout comme au printemps, c’est le moment de mettre à profit ce que j’ai appris en formation et de m’appuyer sur l’endurance acquise au cours des mois précédents. Au programme, longues journées d’escalade en montagne et contacter les entités concernées pour organiser une nouvelle saison de ski et de raquettes. Et c’est reparti pour un tour !

Suivez Joel sur Instagram @joelevans

17